L'établissement d'objectifs peut changer la donne en santé mentale chez les jeunes. Des chercheuses de l'Atlantique s'emploient à optimiser le processus.

Dre Lori Wozney et Dre Jill Chorney

L'établissement d'objectifs constitue un outil précieux pour intervenir avec efficacité auprès des jeunes qui ont des problèmes de santé mentale. Les objectifs peuvent servir à orienter le traitement, offrir des preuves tangibles de progrès et de réussite, favoriser la communication et le lien entre le patient et le soignant, aider à adapter l'approche et guider l'amélioration continue. Plus important encore, les objectifs confèrent aux jeunes le moyen de s'investir activement dans leur parcours de santé mentale en mettant l'accent sur le changement positif.

Toutefois, sans pratiques exemplaires, l'établissement d'objectifs peut perdre de son efficacité. Les cliniciens ont besoin d'être orientés quant à la façon de travailler avec différents types d'objectifs et d'interpréter des données fondées sur des objectifs avec les jeunes, et ils doivent pouvoir s'appuyer sur des stratégies qui tiennent compte des principes d'équité et d'inclusivité.

« Il est possible d'établir des objectifs dans tellement de facettes de la santé mentale, depuis ses propres soins jusqu'aux programmes scolaires et aux services communautaires en milieu hospitalier ou non », explique la Dre Lori Wozney, responsable scientifique de la santé mentale et des dépendances au Centre de santé IWK (en anglais seulement) à Halifax, et professeure auxiliaire adjointe au Département de psychiatrie de l'Université Dalhousie (en anglais seulement).

« S'il faut adopter une approche d'établissement d'objectifs aussi souvent et aussi largement dans tout le continuum de soins, mieux vaut le faire judicieusement. Cependant, nous ne disposons pas pour le moment d'une série de principes qui puissent guider les pratiques et améliorer les interventions. »

Approche axée sur le patient

Pour combler cette lacune dans les connaissances, la Dre Wozney et son équipe ont entrepris le projet Where do you want to go? Developing Practice Principles for Inclusive Goal-Based Outcome Monitoring With Youth in Community Mental Health Services [Quelle direction adopter? Créer des principes guidant des pratiques inclusives de surveillance des résultats axés sur les objectifs chez les jeunes dans les services communautaires de santé mentale], soutenu par la Subvention Catalyseur : Normes de services en santé mentale – enfants et jeunes.

Ce projet à plusieurs étapes vise à doter les cliniciens de pratiques exemplaires sur l'établissement d'objectifs dans une optique d'équité, de diversité et d'inclusion, et à favoriser les échanges des connaissances pour veiller à l'amélioration continue des interventions en santé mentale chez les jeunes, et de leur issue.

« Il est non seulement important, mais essentiel d'adopter une approche axée sur des objectifs pour bien centrer les soins sur la personne », affirme la Dre Jill Chorney, cochercheuse principale du projet, cheffe de la pratique avancée en santé mentale et dépendances au Centre IWK et professeure agrégée de psychiatrie à l'Université Dalhousie.

« Travailler avec des objectifs nous permet d'offrir des soins utiles pour les jeunes et les familles et d'adopter une vision globale de ce qu'ils recherchent dans le traitement. »

Mobilisation active pour des retombées significatives

Les Dres Wozney et Chorney, ainsi que leur équipe, examinent la littérature et commenceront bientôt à tenir des tables rondes pour consulter les jeunes et les aidants, après quoi elles rencontreront des cliniciens. Dans les dernières étapes de leur projet, les patients, les aidants et les cliniciens se réuniront pour discuter des principaux résultats et établir l'ordre des priorités des principes de pratique axés sur des objectifs.

« Nous travaillons avec un grand nombre d'organisations de jeunes pour établir des liens avec les jeunes et les aidants », explique la Dre Chorney.

« Plutôt que de partir de zéro, nous misons sur les partenariats. Nous ne pouvons pas parler à 2 000 jeunes, mais nous pouvons déployer tous les efforts pour assurer une représentation pancanadienne et cibler le recrutement de manière à établir un lien avec des jeunes issus de groupes jusqu'ici sous-représentés. »

Deux produits sont essentiellement visés au terme du projet : des lignes directrices centrées sur le clinicien et de l'information destinée aux jeunes visant à leur montrer comment défendre leurs besoins axés sur des objectifs dans leurs interactions avec des cliniciens.

« Nous avons constaté d'emblée que cet élément doit être véritablement utile et doit orienter la pratique dès le début », ajoute la Dre Chorney.

« Le format définitif sera élaboré conjointement avec les cliniciens et les jeunes, mais je crois que l'essentiel est de déterminer les outils nécessaires pour exercer une influence directe sur la prestation des soins. »

Mise à profit de l'expertise dans le Canada atlantique et ailleurs dans le monde

Le contexte atlantique dans lequel ce projet pancanadien évolue présente des occasions uniques de tirer parti du talent et des données existantes. Le duo souligne le soutien d'organismes partenaires tels que l'Unité de soutien de la SRAP des Maritimes, qui fait partie de la Stratégie de recherche axée sur le patient des IRSC.

« La côte est abrite de nombreux établissements postsecondaires de qualité supérieure. Nous pouvons donc collaborer avec des stagiaires, des cliniciens-chercheurs et des professeurs de la région qui sont des experts et des chefs de file dans ces domaines. »

Le Centre de santé IWK, l'un des meilleurs établissements de soins pédiatriques de courte durée de la région, a le mandat de servir de ressource à toutes les provinces.

« Comme nous œuvrons dans la région de l'Atlantique, il est naturel pour nous de mettre nos ressources et notre expertise en commun et de collaborer. Je ne crois pas que ce projet sera différent à cet égard », affirme la Dre Wozney.

Le projet comporte également une collaboration internationale, notamment avec le Child Outcomes Research Consortium du Royaume-Uni. Les Dres Wozney et Chorney, ainsi que leur équipe, entrevoient favorablement les retombées de leur projet à l'échelle mondiale.

« Bien que nous mettions l'accent sur les normes canadiennes, nous pouvons ajouter au projet une optique internationale pour éclairer non seulement les travaux, mais aussi les occasions d'application des connaissances », explique la Dre Chorney.

Peu importe où les répercussions se font sentir, la plus grande priorité de l'équipe demeure claire : veiller à ce que l'établissement d'objectifs soit un outil utile et participatif qui permette aux jeunes d'atteindre un mieux-être mental optimal.

« Nous devons créer des systèmes qui conviennent aux gens, et non seulement des processus de cases à cocher qui ont peu de signification réelle pour les jeunes », résume la Dre Wozney.

« Mon souhait, c'est que les jeunes et les familles qui demandent de l'aide en santé mentale ne se heurtent pas à un processus bureaucratique, mais qu'ils vivent plutôt une expérience personnalisée et adaptée à leurs besoins et où la plus importante mesure du changement est celle qu'ils ont eux-mêmes choisie. »

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