Des soins de santé mentale équitables pour les jeunes, centrés sur le contact humain et la compréhension, et fondés sur des données objectives

Les services de santé mentale les plus efficaces auprès des jeunes sont adaptés à chaque patient, et une équipe de chercheuses de l’Université McMaster veut faire en sorte qu’aucune population vulnérable ne soit laissée pour compte à cet égard.

« Il faut, pour ainsi dire, révolutionner la façon dont nous abordons la question, car les petites modifications apportées ici et là ne suffisent pas », déclare la Dre Amanda Sim (en anglais seulement), professeure agrégée au Département de psychiatrie et de neurosciences du comportement de l’Université McMaster (en anglais seulement).

« Le grand défi est de sortir des sentiers battus pour réellement faire avancer les choses. Il ne faut pas rester embourbés dans les systèmes traditionnels de prestation de soins. »

Élaboration de stratégies en fonction de la complexité

La Dre Sim est l’une des chercheuses principales de Reimagining Care: Developing a Strategic Framework in Child and Youth Mental Health for Immigrant, Refugee and Racialized Families, (réimaginer les soins : élaboration d’un cadre stratégique en matière de santé mentale des enfants et des adolescents pour les familles immigrées, réfugiées et racisées), un projet de recherche soutenu par la Subvention Catalyseur : Normes de services en santé mentale — enfants et jeunes de l’Institut des neurosciences, de la santé mentale et des toxicomanies des Instituts de recherche en santé du Canada (IRSC).

L’équipe à l’origine du projet se penche sur les obstacles auxquels se butent les familles immigrées, réfugiées et racisées dans l’accès aux soins de santé mentale destinés aux jeunes, afin d’orienter et de concevoir conjointement un cadre de prestation de services équitables et d’accès pour ces populations.

« Ma vision consiste à briser les silos au profit d’une approche plus intégrée et globale pour les familles, qui tiendrait compte des forces de celles-ci ainsi que des éléments complexes et des problèmes avec lesquels elles doivent composer », a déclaré la Dre Andrea Gonzalez (en anglais seulement), professeure agrégée au Département de psychiatrie et de neurosciences du comportement de l’Université McMaster.

Les obstacles à l’accès aux services pour les familles immigrées, réfugiées et racisées qui sont mis en évidence par l’équipe se présentent sous de nombreuses formes, y compris la langue, la stigmatisation, la peur de la discrimination, les problèmes d’orientation dans le système et les complications liées à l’admissibilité ou à l’assurance découlant d’un statut d’immigration précaire. Ajoutons qu’ils peuvent être plus difficiles à surmonter pour les familles nouvellement arrivées au Canada.

« Dans certaines cultures, l’idée d’aller chercher de l’aide à l’extérieur de sa famille est contre-intuitive. Une démarche de la sorte est absurde pour ces personnes, et c’est pourquoi celles-ci ne cherchent habituellement pas à obtenir des soins auprès d’organismes », a expliqué la Dre Purnima Sundar (en anglais seulement), membre du comité directeur du projet et directrice administrative de l’Institut du savoir sur la santé mentale et les dépendances chez les enfants et les jeunes du Centre hospitalier pour enfants de l’est de l’Ontario.

« Lorsque vous ajoutez à ce contexte la pauvreté, l’insécurité alimentaire, l’incapacité à s’orienter dans le système et la nature étrangère de celui-ci, la combinaison de tous ces éléments rend la situation très difficile pour les nouveaux arrivants. »

Compréhension nuancée du bien-être

Un système de soins adapté à la culture devrait lever ces obstacles et être axé sur les relations et la compréhension, par opposition à une approche catégorisée et chiffrée.

« Il ne suffit pas de dire : “si vous avez un client asiatique, vous devez vous assurer de faire telles choses” et, “si vous avez un client indien, vous devez adopter cette approche”. En fait, vous devez vous efforcer d’adopter une approche personnalisée », a ajouté la Dre Sundar.

« Il y a beaucoup de diversité au sein de chaque groupe culturel, et les choses évoluent avec le temps. La maison que mes parents ont quittée il y a 50 ans est très différente de ce qu’elle est aujourd’hui, et la diaspora a également évolué. Nous devons nous concentrer sur la relation avec chaque patient, plutôt que d’essayer de devenir des experts d’une culture en particulier. »

Idéalement, les prestataires de services, grâce à leur propre vécu, et la famille devraient avoir la même compréhension du contexte culturel de celle-ci, de sa conceptualisation de la santé mentale et de son expérience de la migration.

« Les familles envisagent la santé mentale en s’inspirant principalement des conditions sociales dans lesquelles elles vivent, depuis leurs besoins matériels et financiers jusqu’à leurs interactions et liens sociaux. Cette vision de la santé mentale peut être très différente de celle des services traditionnels, qui est plus clinique », explique la Dre Sim.

« De plus, les collectivités et les cultures d’où proviennent de nombreuses populations de réfugiés et d’immigrants considèrent souvent qu’il s’agit d’un concept familial. Leur propre bien-être est inextricablement lié à celui de leur famille, et toute intervention visant à améliorer la santé mentale et le bien-être doit donc être issue de ce contexte familial. »

Des données aux preuves

Pour établir un nouveau cadre de prestation de services équitables, les docteures Gonzalez et Sim collaborent avec des organismes partenaires de tout l’Ontario, y compris le McMaster Health Forum (en anglais seulement), et intègrent leurs données.

« Le Forum est un partenaire clé qui nous aide à recueillir ces renseignements », a déclaré la Dre Gonzalez.

« Le Forum réalise présentement des entretiens avec des intervenants aux points de vue variés, des décideurs politiques, des prestataires de services, des universitaires et d’autres personnes dans tout le pays, afin de comprendre les facteurs auxquels il faut prêter attention. »

Les résultats de ces entretiens et les données connexes seront ensuite fusionnés avec les travaux de consultation de l’équipe et feront l’objet de tables rondes, prévues pour cet automne, au cours desquelles on recueillera les points de vue des nouveaux arrivants, des adultes racisés et des jeunes. Ces consultations orienteront la prochaine phase du projet prévue pour le début de 2024, soit la conception d’une étude de mise en œuvre.

« Bien souvent, nous savons que nous produisons de belles lignes directrices ou stratégies, mais celles-ci restent ensuite sur une tablette à accumuler de la poussière, car nous n’avons pas accordé suffisamment d’attention à la façon dont elles peuvent être mises en œuvre », a fait remarquer la Dre Sim.

« Nous devrons bien réfléchir à tous les facteurs contextuels susceptibles d’influer sur l’adoption du programme : c’est une partie du projet qui nous enthousiasme vraiment parce qu’il s’agit de réfléchir aux étapes concrètes de la mise en œuvre de ces idées. Nous espérons qu’en travaillant avec ces partenaires ici en Ontario, nous pourrons proposer un modèle dont d’autres pourront s’inspirer un peu partout au Canada. »

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