Soutien précoce : Une cheffe de file mondiale du domaine de la santé mentale des jeunes s'appuie sur son expérience à l'échelle internationale pour contribuer à la refonte des services intégrés pour les jeunes au Québec et au Canada

Les années qui marquent le passage de l'adolescence à l'âge adulte sont censées être effervescentes. Elles sont axées sur les grands moments de la vie : la fin des études, la recherche de l'amour, la fondation d'une famille et la poursuite de ses passions. Or, pour de nombreuses personnes, ces moments sont empreints de souffrance.

« Dans les faits, de 60 à 70 % des problèmes majeurs de santé mentale font leur apparition avant 25 ans », rapporte la Dre Srividya Iyer (en anglais seulement), psychologue, professeure au Département de psychiatrie de l'Université McGill, chercheuse au sein de l'Institut universitaire en santé mentale Douglas et du Programme d'évaluation, d'intervention et de prévention des psychoses (PEPP) de Montréal, et cheffe de file mondiale dans le domaine de la santé mentale des jeunes et des interventions précoces à titre de vice-présidente de l'Association internationale pour la santé mentale des jeunes.

Une perspective mondiale

La Dre Iyer ne connaît que trop bien les risques et les répercussions des troubles de santé mentale qui ne sont pas traités. Elle les a vus de ses propres yeux dans son pays d'origine, l'Inde, où elle a entamé sa formation de psychologue. 

« J'ai été formée dans ce qu'on appelait à l'époque un asile psychiatrique », se rappelle-t-elle. « Une poignée d'employés devait s'occuper d'un grand nombre de personnes ayant besoin d'aide, bon nombre desquelles ont dû rester sur place pendant des années. J'ai vu tant de souffrance et de personnes dont la qualité de vie avait été réduite à néant que je me suis dit qu'il doit exister une meilleure solution. »

La Dre Iyer s'est demandé en quoi la situation serait différente si les patients recevaient de l'aide tôt après l'apparition de leurs symptômes.

« Je me suis dit que si nous pouvions intervenir dès les premiers signes de détresse, dès la jeunesse, nous pourrions éviter tous ces résultats négatifs. »

Elle a déménagé au Canada en 2006 et s'est immédiatement consacrée à la transformation de la santé mentale des jeunes. En 2014, elle a codirigé le lancement de ACCESS Esprits ouverts, l'une des premières initiatives qui ont impulsé le mouvement vers les services intégrés pour les jeunes (SIJ) au Canada.

« Nous avions réuni des jeunes et leur famille, des décisionnaires et des fournisseurs de services de 16 établissements provenant de sept provinces et d'un territoire », explique la Dre Iyer. « Notre objectif était de trouver un nouveau modèle et de nous pencher sur comment nous pourrions modifier à la fois les façons dont les jeunes accèdent aux services de santé et le mode de prestation de ces services. »

Bâtir un réseau pancanadien

Bénéficiaire d'une contribution équivalente des Instituts de recherche en santé du Canada (IRSC) et de leur partenaire philanthropique, la Fondation Graham Boeckh, dans le cadre de la Stratégie de recherche axée sur le patient, le réseau ACCESS Esprits ouverts s'est mis à l'œuvre sans tarder. Il s'est développé en un réseau pancanadien de plus de 250 chercheurs, fournisseurs de services, décisionnaires, jeunes et membres de leur famille dont l'objectif est de transformer les soins de santé mentale pour les jeunes vivant en milieu urbain ou rural, issus de communautés autochtones ou se trouvant dans un contexte post-études secondaires ou en situation d'itinérance. La réussite du projet a servi de tremplin au lancement de l'initiative Réseau de réseaux – Services intégrés pour les jeunes (RR-SIJ) des IRSC, qui se veut un réseau pancanadien de systèmes de santé apprenants provinciaux et territoriaux qui échangent des données en vue d'améliorer la prestation des services de mieux‑être aux jeunes à l'échelle du pays. Selon la Dre Iyer, en moins d'une décennie, de grands progrès ont été réalisés dans le domaine de la santé mentale des jeunes.

« Tant les données d'ACCESS Esprits ouverts que celles de l'initiative RR-SIJ montrent que davantage de jeunes demandent de l'aide, et c'est formidable. Ainsi, c'est aller dans la bonne direction que de fonder les services sur les besoins des jeunes tout en mettant l'accent sur l'équité et la diversité. C'est la preuve que si les services sont mis sur pied correctement, ils seront utilisés », dit-elle.

Assurer des soins de santé équitables pour les jeunes au Québec

La Dre Iyer se concentre maintenant sur son plus récent projet : Aire ouverte : Understanding and scaling up the principles, practices and values of Quebec's youth services to inform research, policy and service integration in a pan-Canadian context. Avec le Dr Martin Goyette de l'École nationale d'administration publique à Montréal, la Dre Iyer dirige une équipe de recherche qui recueille et évalue des données afin de déterminer les priorités et les pratiques exemplaires pour Aire ouverte, un réseau de centres de SIJ au Québec.

« Au Québec, nous nous concentrons sur les jeunes qui, par le passé, n'ont pas eu un accès équitable au système de santé, c'est-à-dire les jeunes autochtones, les jeunes à risque d'itinérance ou les jeunes qui ont traditionnellement été marginalisés ou mal desservis », explique la Dre Iyer. « Le projet Aire ouverte a été lancé en 2018 avec la mise en place de trois points de service. On en compte maintenant 19. Notre objectif est de porter ce nombre à environ 27 d'ici la fin de 2024, le but ultime étant que chaque jeune au Québec ait accès à un point de service. »

La Dre Iyer demeure modeste lorsqu'elle évoque ses travaux, mais elle sait que les investissements dans ses recherches et celles de quantité d'autres collègues chercheurs améliorent le bien-être mental des jeunes au Canada. Elle se dit privilégiée de codiriger le réseau de SIJ autochtone aux côtés du Dr Christopher Mushquash, chercheur principal du réseau, et de nombreux partenaires autochtones.

« C'est gratifiant de voir des indicateurs de progrès concrets. C'est ce qui m'incite à continuer », dit-elle, souriante. « Nous sommes particulièrement centrés sur l'équité, sur l'inclusion et sur les participants au dialogue. Ce changement de mentalité est d'une importance inestimable. Il entraîne de réels changements. Notre but ultime est de doter les jeunes des outils dont ils ont besoin pour réaliser leurs rêves. »

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