Un réseau soutient l’autonomisation des patients autochtones dans la recherche sur le diabète

Les traditions autochtones alliées à un engagement respectueux révèlent aux chercheurs et aux professionnels de la santé des moyens plus efficaces de gérer le diabète

Autrefois une maladie qui touchait principalement les adultes, le diabète de type 2 (DT2) est aujourd'hui l'une des maladies chroniques pédiatriques connaissant la plus forte croissance dans le monde, les populations autochtones étant parmi les plus touchées. Au Canada, près de la moitié des nouveaux cas de DT2 signalés concernent des enfants et des adolescents autochtones.

Action diabète Canada (ADC), l'un des réseaux de la SRAP sur les maladies chroniques, a reconnu l'importance de s'attaquer au problème du diabète dans les communautés autochtones. Le réseau intervient en faisant des jeunes autochtones des alliés dans la prévention du diabète et en privilégiant des approches autochtones axées sur l'écoute et le partage des connaissances.

La santé des peuples autochtones comme priorité de recherche

L'une des principales lacunes en matière de recherche relevées très tôt par les participants au sein d'Action diabète Canada était le manque d'attention accordée à la santé des peuples autochtones.

Dr Jonathan McGavock

« Cela ne figurait pas vraiment dans notre plan initial, mais nous savions qu'il s'agissait d'une lacune », explique le Dr Jonathan McGavock, scientifique non autochtone à l'Université du Manitoba et chercheur à Action diabète Canada.

« Le diabète touche de façon disproportionnée les Autochtones du Canada et du monde entier, à des taux trois à cinq fois plus élevés, selon l'endroit où l'on vit. Au Manitoba, les taux de DT2 pédiatrique sont environ 20 fois plus élevés que dans le reste du pays et la plupart de ces jeunes sont Autochtones. »

Les raisons de cette disparité sont complexes. Les facteurs de risque comprennent les antécédents familiaux et la génétique. De surcroît, la colonisation a contribué à la pauvreté, au racisme, au stress et au manque d'accès à une alimentation saine, autant de conditions qui accentuent le risque de maladie, notamment de diabète.

Depuis, ADC a fait de la santé des peuples autochtones l'un de ses six principaux programmes de recherche. Jusqu'à récemment, le programme était codirigé par le Dr Alex McComber, chercheur à l'Université McGill et membre de la communauté Kanien'kehá:ka de Kahnawake, à proximité de Montréal. Ses travaux novateurs ont contribué à placer les Autochtones ayant un vécu expérientiel au premier plan de la recherche sur le diabète au Canada.

Autonomisation des jeunes autochtones

ADC soutient le programme de mentorat des jeunes autochtones (en anglais seulement), qui aborde le bien-être sous l'angle de la résilience. Il est mené par des adolescents autochtones qui servent de mentors à des enfants d'âge primaire dans leurs communautés.

IYMP à Kananaskis, Alberta

Ce programme a débuté sous forme de projet pilote dans la communauté Anishinabewaki (Oji-Cree) de la Première Nation Garden Hill au Manitoba. Son succès a été tel que les aînés ont demandé à ce qu'il soit déployé dans d'autres communautés autochtones. Il est désormais implanté dans 50 lieux au Manitoba, en Saskatchewan, en Alberta, au Québec, dans le nord de l'Ontario et dans les quartiers défavorisés du centre-ville de Toronto. Chaque année, 1 500 enfants y participent avec le concours de 800 adolescents-mentors.

Son succès peut s'expliquer par son orientation vers la santé holistique — santé mentale, spirituelle, émotionnelle et physique. Le programme de mentorat des jeunes autochtones privilégie également l'identité et s'appuie sur une pratique décoloniale et une théorie autochtone fondée sur la résilience, comme le cercle du courage (en anglais seulement) et les quatre R (respect, pertinence, réciprocité et responsabilité – en anglais seulement). Un autre élément clé de son succès est sa souplesse. Bien que les conditions essentielles à sa mise en œuvre soient établies, les communautés ont la possibilité d'appliquer les composantes du programme en s'appuyant sur leurs besoins et leurs forces.

Par exemple, une communauté a eu l'idée d'organiser son programme de mentorat des jeunes autochtones après l'école le vendredi, augmentant ainsi la fréquentation scolaire en ce jour où le taux d'absentéisme était particulièrement élevé. Une autre école a organisé son programme le midi afin de permettre aux élèves du secondaire qui ne pouvaient habituellement pas prendre part à des activités parascolaires d'y participer. Même le rôle de jeune mentor prend de plus en plus d'ampleur, permettant ainsi aux élèves du secondaire d'apprendre de leurs pairs.

Cercle de patients autochtones : orientation des priorités et engagement approprié

Sasha Delorme

Sasha Delorme figure parmi les premiers partenaires autochtones d'ADC ayant un vécu expérientiel du diabète. Elle s'est jointe au réseau en 2017, cinq ans après que son fils Brayson ait reçu un diagnostic de diabète de type 1 (DT1). Peu de temps après avoir entamé sa collaboration avec le réseau, elle a reçu un diagnostic de DT2. 

Elle a décidé de s'impliquer dans la recherche sur le diabète après avoir fait l'expérience des obstacles auxquels les parents et les patients peuvent être confrontés.

« Travailler avec les chercheurs et les médecins m'a donné une voix dont je n'avais pas l'impression de disposer auparavant », explique-t-elle. « Non seulement j'en apprends davantage sur cette maladie et sur la façon de la gérer, tant pour mon fils que pour moi-même, mais j'en apprends également davantage sur ma culture. Ma mère a été adoptée par une famille caucasienne dans le cadre de la rafle des années soixante, si bien que je ne me suis jamais réellement familiarisée avec la plupart des aspects culturels de mes origines. Le fait de faire partie de ce groupe de patients partenaires autochtones m'a vraiment aidé à me rapprocher de ma culture. »

Elle est membre du Cercle de patients autochtones d'ADC, qui compte 11 patients et soignants dont les expériences et les connaissances sont mises à profit pour définir des priorités de recherche.

« Au départ, la principale priorité était de renforcer nos liens les uns avec les autres », dit-elle. « Instaurer un climat de confiance nous permet de tenir des conversations plus riches et plus significatives. Nous disposons également d'une plateforme pour proposer nos propres idées, au lieu que les chercheurs nous soumettent les leurs. »

Faire la différence

Un récent événement de les Cercle de patients autochtones

Le Cercle des patients autochtones a grandement contribué au réseau. Il a permis d'orienter les ateliers destinés aux stagiaires, aux patients partenaires et au personnel vers des approches culturellement sécurisantes et antiracistes dans le contexte de la recherche. Il a apporté des conseils sur des projets de recherche pour veiller à ce qu'ils soient appropriés et pertinents pour les Autochtones vivant avec le diabète.

Il a également contribué à plusieurs publications où ont été définies des priorités pour l'amélioration des soins du diabète (en anglais seulement), établies par des patients et des universitaires autochtones, faisant des Autochtones des partenaires égaux dans le processus de définition des priorités d'ADC, et aidant à déterminer des stratégies favorisant une participation éthique des patients autochtones (en anglais seulement) dans les projets de recherche.

« Relier la vision autochtone du monde aux patients partenaires d'Action diabète Canada a probablement été l'une des choses les plus marquantes que nous ayons faites au sein de notre réseau », déclare le Dr McGavock. « Les enseignements que les patients partenaires autochtones y ont apportés ont été très enrichissants pour les autres patients partenaires. »

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