Résumé de recherche du RIEM
Antagonistes des récepteurs 5-HT3 (antiémétiques) et innocuité cardiaque

Auteurs : Équipe SEARCH & PREVENT du Réseau sur l’innocuité et l’efficacité des médicaments (RIEM) des IRSC

Quelle est la situation actuelle?

  • L’ondansétron, un antagoniste 5-HT3 approuvé au Canada comme antiémétique, est utilisé pour la prévention des nausées et des vomissements postopératoires ou associés à la chimiothérapie.
  • Il est également utilisé hors indication pour traiter les nausées et les vomissements de la grossesse et l’hyperemesis gravidarum, ainsi qu’au cours de la période périopératoire dans une césarienne.
  • La monographie de l’ondansétron comprend une mise en garde concernant l’allongement de l’intervalle QT, qui peut avoir de graves conséquences au niveau cardiaque.
  • Des variantes génétiques du CYP2D6, l’une des principales enzymes intervenant dans le métabolisme de l’ondansétron, ont été corrélées avec l’efficacité de ce dernier, une augmentation de l’activité du CYP2D6 entraînant une diminution des concentrations d’ondansétron.
  • Les facteurs génétiques qui influent sur l’innocuité cardiaque de l’ondansétron n’ont pas été étudiés.
  • Cela montre la nécessité d’une surveillance active chez les Canadiens traités avec ce médicament pour comprendre et combler le manque actuel de données probantes.

Résumé et conséquences

  • L’ondansétron est un antiémétique très efficace pour le traitement des nausées et des vomissements. Par contre, ce médicament a aussi été associé à un allongement de l’intervalle QT, d’où le risque de troubles cardiaques graves. Aucune des études pharmacogénomiques sur la réponse thérapeutique à l’ondansétron n’a considéré les facteurs génétiques qui influent sur l’innocuité cardiaque. Comme l’ondansétron est également utilisé hors indication, il est important d’examiner son innocuité cardiaque, de même que l’effet de variantes génétiques sur son efficacité et son innocuité chez les patients qui le reçoivent.

  • Conséquences : Il est possible d’identifier avant le début du traitement les patients chez qui un allongement de l’intervalle QT induit par l’ondansétron est susceptible de survenir en raison de la présence de variantes génétiques ou de l’utilisation de médication concomitante qui modifie l’activité enzymatique du CYP2D6. Cette étude a fourni des résultats pertinents du point de vue biologique au-delà des voies métaboliques du médicament. Ces résultats représentent un premier pas vers la compréhension et la prédiction de cette réaction indésirable. Au bout du compte, ces données permettront aux cliniciens, aux patients et à leurs familles de mieux évaluer les risques pour la santé cardiovasculaire et d’intégrer des mesures préventives afin de minimiser les méfaits associés au médicament tout en optimisant la probabilité de maintenir l’effet antiémétique de l’ondansétron.

Renseignements : Dr Bruce Carleton, bcarleton@popi.ubc.ca

Quel était le but de l’étude?

  • Déterminer et comparer de manière prospective le profil d’innocuité cardiaque de l’ondansétron chez trois groupes : les enfants après chirurgie, les patients en oncologie pédiatrique et les femmes enceintes.
  • Déterminer les variantes génétiques associées à l’allongement de l’intervalle QT induit par les antagonistes 5-HT3.

Comment l’étude a-t-elle été menée?

  • Des patients recevant de l’ondansétron ont été recrutés à travers le Canada par l’entremise de SEARCH & PREVENT, le réseau de surveillance des effets indésirables des médicaments du RIEM des IRSC.
  • Au total, 261 patients ont été recrutés dans des établissements cliniques de trois provinces : l’Hôpital pour enfants de la Colombie-Britannique, le BC Women’s Hospital & Health Centre – Vancouver (Vancouver, C.-B.), le Centre de sciences de la santé de Winnipeg (Winnipeg, Man.), et l’Hôpital St. Michael (Toronto, Ont.).
  • Un ECG à 12 dérivations a été enregistré pour chaque patient 5 et 30 minutes après la première dose d’ondansétron.
  • Des échantillons d’ADN des patients ont été génotypés pour environ 5 millions de variantes génétiques à l’échelle du génome, y compris les variantes candidates qui avaient été précédemment associées aux résultats du traitement par ondansétron ou à l’allongement de l’intervalle QT.
  • Des analyses d’association à l’échelle du génome ont été réalisées pour découvrir les gènes en cause dans l’allongement de l’intervalle QT.

Qu’a révélé l’étude?

  • L’ondansétron a entraîné un allongement de l’intervalle QT chez 24,1 % des patients, allongement dangereux chez 1,2 % d’entre eux.
  • Le changement le plus important de l’intervalle QT s’est produit cinq minutes après l’administration de l’ondansétron, le plus significatif étant observé dans la cohorte de chirurgie pédiatrique (P=2,9 x 10-5).
  • Des analyses ciblées sur CYP2D6 n’ont révélé aucune association entre le score d’activité de CYP2D6 et l’allongement de l’intervalle QT induit par l’ondansétron (P=0,77) ou le pourcentage de changement de l’intervalle QTc cinq minutes après l’administration de l’ondansétron (P=0,81). 
  • L’absence d’associations entre les variantes génétiques candidates et l’allongement de l’intervalle QT induit par l’ondansétron illustre l’importance d’utiliser des approches non biaisées pour découvrir des pistes biologiques à étudier ultérieurement.
  • L’étude a permis de découvrir une nouvelle variante du gène SLC36A1 qui réduit de 25 fois le risque d’allongement de l’intervalle QT (P=1,97x10-7). Ce gène transporte un large éventail de médicaments et de dérivés à base d’acides aminés, dont l’ondansétron. La variante génétique de SLC36A1 réduit probablement le transport et l’absorption de l’ondansétron, ce qui fait diminuer le risque de problèmes cardiaques.
  • Une nouvelle variante du gène TLR3 également mise en évidence dans l’étude réduit significativement l’intervalle QT et fait diminuer son risque d’allongement sous l’effet de l’ondansétron (P=2,00 x 10-7). Cette variante génétique augmente probablement la concentration de sérotonine, connue pour raccourcir l’intervalle QT.
  • Ces importants résultats permettent de mieux comprendre cet effet indésirable potentiellement mortel et représentent un important premier pas vers l’amélioration de l’innocuité de ce médicament antiémétique d’usage courant.

Drögemöller BI, et coll. A pharmacogenomic investigation of the cardiac safety profile of ondansetron in children and pregnant women. Biomedicine & Pharmacotherapy. Avril 2022,148:112684. PMID: 35149390

Cette recherche a été financée par le Réseau sur l’innocuité et l’efficacité des médicaments des IRSC et réalisée par des chercheurs affiliés aux établissements suivants :

Logos: The University of British Columbia, University of Manitoba, SickKids, Canadian Pharmacogenomics Network for Drug Safety
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