Ce que nous avons entendu : rapport de l’atelier d’échange de connaissances en fin de subvention
Subvention Catalyseur : Recherche interventionnelle en santé des populations liée à la légalisation du cannabis

Date de la rencontre : 11 juin 2019


Introduction

Le 11 juin 2019, les Instituts de recherche en santé du Canada (IRSC), en collaboration avec le Centre canadien sur les dépendances et l’usage de substances (CCDUS), ont organisé à Ottawa, en Ontario, un atelier d’échange de connaissances en fin de subvention pour la subvention Catalyseur « Recherche interventionnelle en santé des populations liée à la légalisation du cannabis ». En tout, 14 équipes de recherche ont été financées par le truchement de ce concours et chacune d’elles devait inclure au moins un utilisateur des connaissances dans son projet.

Le présent rapport renferme une synthèse des données présentées par les 14 équipes de recherche, un résumé des points de vue des utilisateurs des connaissances et des parties intéressées qui ont été exprimés, et les points saillants des discussions qui ont suivi.

Mise en garde :

L’information qui suit vise à résumer les propos entendus lors de l’atelier. Comme les IRSC ont fait tout leur possible pour transmettre ce texte aux participants le plus rapidement possible, les erreurs ou les omissions sont involontaires. Le présent rapport ne doit pas être considéré comme un compte rendu définitif des résultats des recherches. Les lecteurs sont priés d’effectuer un suivi directement auprès des titulaires de subvention afin d’obtenir les renseignements les plus récents sur leurs projets.

Le cahier d’information de l’atelier est mis à la disposition du public sur demande. Les demandes peuvent être envoyées au Centre de contact des IRSC à support support-soutien@cihr-irsc.gc.ca.

Objectifs de l’atelier

L’atelier visait principalement à :

  • Faciliter l’échange des connaissances générées par des projets sur la manière dont la légalisation et la règlementation du cannabis à des fins non médicales au Canada peuvent influer directement ou indirectement sur la santé des populations et l’équité en santé parmi les parties prenantes et les chercheurs.
  • Encourager les échanges entre le milieu de la recherche, les responsables des politiques et autres parties intéressées pour explorer comment ces données probantes peuvent guider l’élaboration courante et future des politiques, des pratiques et des programmes touchant le cannabis.
  • Discuter des besoins de données probantes et de la façon la plus efficace d’obtenir ou de produire ces données pour aider au suivi et à l’évaluation des bienfaits, méfaits et conséquences non voulues possibles de la légalisation et de la règlementation du cannabis à usage non médical.

Message du directeur scientifique de l’Institut des neurosciences, de la santé mentale et des toxicomanies des IRSC

Entrée en vigueur le 17 octobre 2018, la Loi sur le cannabis légalise les produits du cannabis non médical au Canada, y compris le cannabis frais et séché, et les huiles de cannabis. La vente d’autres produits (concentrés et produits comestibles) devrait être légalisée à l’automne 2019.

Il reste encore beaucoup à apprendre sur l’usage du cannabis, ses effets sur la santé et la sécurité, et les implications comportementales, sociales, culturelles, éthiques et économiques de sa légalisation à l’échelle nationale et dans les provinces et territoires. Plusieurs rapports ont souligné le besoin de meilleures données de recherche pour guider les politiques, les pratiques thérapeutiques et les démarches de réduction des méfaits et de prévention.

Les IRSC appuient la création de connaissances dans ce domaine par l’intermédiaire de la Stratégie de recherche intégrée sur le cannabis (SRIC), qui vise à combler les manques de données dans des domaines cibles. La vision d’ensemble de la SRIC consiste à fournir une série d’activités bien coordonnées pour contribuer à faire du Canada un leader mondial dans le renforcement des capacités de recherche et la collecte de données sur les effets du cannabis. Cela inclut la validation des bienfaits thérapeutiques potentiels du cannabis, la compréhension des risques et des méfaits, et le soutien à la création de modèles de politique et de règlementation pour l’étude de l’usage du cannabis (y compris l’établissement de normes de données communes).

En juin 2018, les IRSC ont investi 1,4 million de dollars par l’entremise de la SRIC pour soutenir 14 projets visant à stimuler la recherche sur les effets de la légalisation du cannabis sur la santé. Ces subventions Catalyseur avaient pour objet la recherche interventionnelle en santé des populations en lien avec la légalisation et la règlementation du cannabis non médical au Canada. Les projets ont été conçus pour appuyer la collecte de données sur l’usage du cannabis et la santé, comprendre les effets de la légalisation et de la règlementation du cannabis sur certains groupes et évaluer les modèles règlementaires existants pour les substances contrôlées.

L’atelier, qui a réuni des chercheurs, des décideurs, des membres de la communauté, y compris des personnes ayant une expérience concrète, et d’autres utilisateurs des connaissances, était une occasion d’échanger de l’information et de nouvelles idées et d’envisager l’avenir, le travail qu’il reste à accomplir et la façon dont il peut être facilité par la base de connaissances actuelle.

Au nom des IRSC, je tiens à remercier le Centre canadien sur les dépendances et l’usage de substances (CCDUS) pour son appui à cet atelier et sa contribution à titre d’utilisateur des connaissances pour trois des 14 subventions Catalyseur. Les IRSC ont la chance d’avoir des partenaires comme le CCDUS pour optimiser l’impact des conclusions découlant de ces possibilités de financement et transformer les nouvelles connaissances sur le cannabis en interventions.

Enfin, je remercie tous les chercheurs, utilisateurs des connaissances, parties prenantes et collègues pour leur participation à cette importante activité d’échange du savoir. Ensemble, nous avons la capacité de faire du Canada un chef de file mondial de la recherche sur le cannabis.

Samuel Weiss, Ph.D., MSRC, MACSS
Directeur scientifique, Institut des neurosciences, de la santé mentale et des toxicomanies des IRSC

Séance 1 : Surveiller les effets de la légalisation

Lors de cette séance, six équipes de recherche ont présenté leur projet et un panel de discussion rassemblant des utilisateurs des connaissances a traité des répercussions globales de la légalisation du cannabis.

Légalisation de la consommation de cannabis à des fins récréatives au Canada : synthèse des connaissances

Présentatrice : Sareen Singh, Université McGill

Mme Singh a présenté les résultats d’une analyse de données secondaires visant à évaluer l’incidence de la légalisation du cannabis à des fins récréatives sur les taux d’accidents de la route mortels et de décès attribuables à ceux-ci, les résultats d’un examen de la portée de la littérature publiée et grise sur la consommation prénatale de cannabis et les résultats d’une étude d’ensemble des approches adoptées pour la règlementation de cette substance en Amérique du Nord.

À l’aide de données provenant des États-Unis, les chercheurs ont remarqué une hausse de 4 % des accidents de la route mortels et de 6 % des décès attribuables à ceux-ci dans neuf territoires qui avaient légalisé le cannabis à des fins récréatives. Si le taux était semblable au Canada, cela signifierait qu’il y aurait 110 décès de plus annuellement. Lors d’une analyse de sensibilité, les chercheurs n’ont constaté aucune différence de situation entre la première année de la légalisation et les années ultérieures, ce qui laisse entendre que l’association persiste après la première année.

Les données sur la consommation de cannabis par les femmes enceintes ont été obtenues de diverses populations et produites en suivant une variété de méthodes de déclaration. Les chercheurs ont constaté que la consommation était à son plus élevé durant le premier trimestre et qu’elle augmentait au fil des ans, tout en notant un manque de renseignements sur la fréquence d’utilisation et l’âge gestationnel de l’exposition dans l’ensemble. Aucune étude sur la situation avant et après la légalisation n’a été trouvée. On a observé une association entre la consommation prénatale de cannabis et certains effets indésirables sur la santé des nouveau-nés.

Mme Singh a fait remarquer la présence de différences entre les règlements sur le cannabis et souligné la nécessité de surveiller et d’évaluer la règlementation, en particulier pour ce qui est de l’âge minimum de consommation, la limitation de l’usage dans les propriétés privées par rapport à son autorisation dans certains lieux publics et la législation sur la conduite automobile.

Permettre la surveillance et l’avancement des connaissances sur l’exposition à la consommation de cannabis

Présentatrice : Pamela Kaufman, Université de Toronto

La Dre Kaufman a parlé de son étude, qui comportait un examen de la portée à propos de l’exposition à la fumée secondaire du cannabis, des analyses de données autodéclarées provenant d’enquêtes sur la population et la mise au point d’un système de surveillance en ligne (Cannabis Informatics Monitoring System [CIMS]).

Les chercheurs ont mis en évidence une absence de données à propos des effets sur la santé de l’exposition à la fumée secondaire et tertiaire du cannabis, mais souligné que cette fumée secondaire contient des produits chimiques semblables à ceux de la fumée secondaire du tabac, y compris au moins 33 cancérogènes connus. Des données limitées provenant d’études sur des animaux laissent entendre la possibilité d’effets respiratoires et cardiovasculaires indésirables de l’exposition à la fumée de cannabis. En outre, des études sur l’exposition humaine ont constaté que le THC est détectable chez les gens qui ne consomment pas de cannabis mais qui ont été exposés à sa fumée secondaire dans certains endroits (comme une petite pièce où la ventilation est faible).

Les chercheurs ont analysé les données de 2017 de l’enquête Monitor du Centre de toxicomanie et de santé mentale (CAMH) et constaté que 7,5 % des Ontariens qui habitent des complexes d’habitation ont signalé avoir été exposés à la fumée du cannabis chez eux. Le taux d’exposition autodéclarée à la fumée de cannabis ambiante était semblable à celui de l’exposition à la fumée de tabac ambiante (6,6 %). Les personnes exposées à la fumée du cannabis étaient célibataires, avaient consommé la substance au cours des 12 derniers mois et le revenu de leur ménage était moins élevé.

Plus de recherches sur les effets de l’exposition à la fumée du cannabis sur la santé sont nécessaires. La règlementation devrait tenir compte des endroits où les gens sont exposés et du degré d’exposition. Il faudrait continuer de surveiller l’exposition à la fumée de cannabis ambiante dans les complexes d’habitation afin de déterminer les changements survenus après la légalisation.

La Dre Kaufman a indiqué que la base de données interrogeable en ligne du CIMS s’inspirera de celle du Tobacco Informatics Monitoring System (en anglais seulement) et qu’elle comprendra des données démographiques déjà analysées pour les principaux indicateurs liés au cannabis ainsi que des graphiques et des tableaux téléchargeables. Plusieurs enquêtes sur la population sont déjà incluses et d’autres seront ajoutées dès qu’elles seront disponibles.

Une infrastructure de données pour surveiller l’incidence de la légalisation du cannabis : stratégies de collecte et de couplage de données pour éclairer les politiques sociales et sanitaires

Présentateur : Nathan Nickel, Université du Manitoba

Le Dr Nickel a fait ressortir un avantage de la légalisation : une meilleure capacité de mesurer la consommation de cannabis à des fins non médicales par la population canadienne. La stratégie de son équipe consistait à tirer profit d’un riche dépôt de données qui se trouve au Manitoba afin de coupler l’usage de cannabis avec d’autres résultats, y compris ceux qui sont consignés dans des dossiers relatifs aux soins de santé (y compris des données liées aux pharmacies et aux hôpitaux), à la justice (accusations, système judiciaire, incarcération), à l’éducation (de la maternelle à la 12e année et études postsecondaires) et aux services sociaux (aide au revenu, sécurité sociale). Grâce à cette approche, on dispose, à propos des résultats, de données exhaustives sur le long terme qui peuvent être corrélées au niveau de la personne et de la famille et qui sont exemptes de biais de rappel et d’autres limites présentes dans les données autodéclarées sur les résultats.

L’équipe est en train de mettre au point un système de collecte de l’information sur la consommation de cannabis. Entre autres, elle met à l’essai des méthodes de collecte des données et développe une application d’expérience utilisateur pour recueillir des renseignements sur l’usage de cette drogue, y compris sur la souche, la quantité consommée et l’expérience. Les chercheurs demanderont ensuite le consentement au couplage de ces renseignements avec l’information qui se trouve déjà dans le dépôt.

Le Dr Nickel a fait remarquer que le fait de se fier à des données autodéclarées sur les résultats limite notre capacité de comprendre les issues à court et à long terme associées avec la consommation de cannabis à des fins non médicales. Par conséquent, le couplage de l’information sur l’usage de cette drogue avec les données administratives robustes qui existent au Manitoba constitue une occasion de mieux comprendre les incidences et les conséquences à long terme de la consommation de cette substance.

Légalisation du cannabis et système d’information ontarien sur la santé mentale : tendances et constantes de la consommation de cannabis chez les personnes admises en psychiatrie en Ontario, de 2007 à 2017

Présentateur : Christopher Perlman, Université de Waterloo

Le Dr Perlman a présenté son enquête sur la prévalence de la consommation de cannabis par les personnes hospitalisées qui occupaient des lits réservés au soin des maladies mentales en Ontario au cours des dix années précédant la légalisation du cannabis à des fins non médicales. À l’aide de données d’évaluation exhaustives du système interRAI sur la santé mentale, qui datent de 2007 à 2017, les chercheurs ont examiné la consommation du cannabis, l’usage d’autres substances, les diagnostics du DSM et d’autres variables.

Cette étude a repéré une tendance à la hausse, durant cette décennie, à la fois de la consommation récente (dans les 30 jours précédant l’admission) et de l’usage du cannabis en général, peu importe le groupe d’âge, le sexe et le diagnostic. La prévalence de la consommation de cannabis a augmenté de 15 % en 2007 à 27 % en 2017. Elle était la plus élevée chez les personnes âgées de 18 à 24 ans (43 %), mais d’importantes hausses ont été observées dans tous les groupes d’âge. La prévalence de la consommation était la plus élevée chez les hommes (25 %), les personnes souffrant de schizophrénie ou d’autres psychoses (21 %) et les patients atteints de troubles de la personnalité (26 %). Les augmentations de prévalence les plus fortes ont été constatées chez les personnes souffrant de troubles anxieux, de troubles de la personnalité, de schizophrénie ou d’autres troubles psychotiques. La consommation concomitante de substances, y compris celle d’autres drogues et d’alcool, était courante.

Le Dr Perlman a souligné la complexité de la relation entre la consommation de cannabis et la santé mentale, ce qui reflète probablement des changements d’attitude relativement à l’usage ou un accroissement de celui-ci pour l’automédication des besoins en santé mentale. Il a insisté sur la nécessité d’évaluer les habitudes de consommation des personnes souffrant de problèmes de santé mentale, y compris l’incidence de la légalisation sur cette population.

Réactions des provinces et des principales communautés à la légalisation fédérale du cannabis : étude portant sur plusieurs autorités

Présentateur : Sergio Rueda, Centre de toxicomanie et de santé mentale

Le Dr Rueda a insisté sur le besoin urgent d’étudier la législation fédérale canadienne sur le cannabis dans le contexte des interventions règlementaires provinciales et des préoccupations des principales communautés. Son étude s’est servie de sources de données qualitatives de quatre provinces (Québec, Ontario, Alberta, Colombie-Britannique) et a mis l’accent sur les communautés racisées et les groupes autochtones.

Parmi les principaux thèmes dégagés de cette étude, on trouve la nécessité de l’apport et de la participation des communautés racisées à l’élaboration des politiques, et un puissant désir de renseignements crédibles sur le cannabis, y compris celui de messages de prévention efficaces, en particulier à l’intention des parents et des jeunes. Selon les provinces, l’un des problèmes consécutifs à la légalisation est le besoin de plus de temps pour mettre en œuvre la règlementation sur le cannabis, concevoir des programmes éducatifs et consulter les communautés (en particulier les communautés autochtones).

Le Dr Rueda a fait remarquer que les données sur l’origine ethnique et les immigrants font défaut et qu’on ne tient habituellement pas compte des points de vue des communautés autochtones et racisées lors de la prise de décisions stratégiques. Il a mis l’accent sur le besoin de transférer les connaissances et de diffuser les résultats de la recherche sur le cannabis afin d’éclairer l’élaboration des politiques et d’éduquer le public.

L’incidence de la légalisation du cannabis sur la santé en milieu universitaire : approche multiméthodes pour établir un point de référence et surveiller le changement

Présentatrice : Michelle St. Pierre, Université de la Colombie-Britannique

Mme St. Pierre a rendu compte des résultats d’une enquête qui a évalué les taux de consommation du cannabis et les résultats de santé connexes chez de jeunes adultes (des étudiants de premier cycle [18 à 25 ans] de l’Université de la Colombie-Britannique) durant les périodes précédant et suivant directement la légalisation du cannabis (de février 2018 à avril 2019).

L’équipe de recherche n’a constaté aucune modification au chapitre de la première consommation de cannabis ou du taux d’utilisation durant les six mois qui ont suivi la légalisation. Aucun changement de méthode de consommation n’a été observé, mais Mme St. Pierre a fait remarquer que le cannabis comestible n’était pas encore légal au moment de l’enquête.

On a constaté (tant avant qu’après la légalisation) que près de 25 % des répondants prenaient du cannabis plutôt que de l’alcool et que certains le faisaient intentionnellement pour réduire la quantité d’alcool consommée. Par ailleurs, cette étude a révélé qu’après la légalisation, les jeunes adultes étaient moins susceptibles de donner la santé et la sécurité routière comme raisons de substituer le cannabis à l’alcool.

Sur le plan des normes sociales, les chercheurs ont noté que les personnes qui prenaient du cannabis percevaient des taux d’usage plus élevés chez leurs pairs et que la différence entre les taux réels et perçus de consommation par les pairs était moins grande qu’avant la légalisation.

Perspective des utilisateurs des connaissances et panel de discussion

Dans cette portion de l’atelier, des utilisateurs des connaissances ont présenté leurs perspectives sur les projets de recherche auxquels ils ont pris part. Les participants ont ensuite été invités à poser des questions, puis une discussion de groupe a eu lieu.

Hanan Abramovici, Santé Canada

La Dre Abramovici a amorcé la discussion en faisant ressortir le manque de compréhension actuel des issues maternelles et fœtales de la consommation de cannabis durant la grossesse et l’allaitement. Des règlements fondés sur des données probantes et une sensibilisation axée sur la santé publique sont nécessaires pour réduire les risques.

En outre, il y a un manque de connaissances sur la manière dont la consommation de cannabis nuit à la capacité de conduire. Un plus grand nombre de décès a été observé dans certaines régions après la légalisation du cannabis, mais les données sont complexes et ne tiennent pas nécessairement compte de facteurs susceptibles d’influencer les résultats, comme la consommation de cette drogue avec d’autres substances.

Il faut réaliser plus de recherches et d’initiatives de sensibilisation du public afin de réduire les risques associés au cannabis tant durant la grossesse qu’au volant.

Daphne Mayer, KFL&A Public Health

Mme Mayer s’est exprimée au nom des praticiens de la santé publique, indiquant que, bien que les fournisseurs de soins de santé publique et les cliniciens connaissent bien les risques de la consommation de tabac et de l’exposition à la fumée secondaire, on dispose de peu d’information pour soutenir les politiques municipales, les services communautaires et les messages de santé publique concernant le cannabis. Elle a aussi fait état de la nécessité d’avoir savoir davantage sur les rapports entre la consommation de cannabis et l’exposition à celui-ci, d’une part, et l’allaitement, d’autre part. Les nouvelles mères demandent des renseignements sur les dangers potentiels du cannabis, mais les infirmières en santé publique sont moins à l’aise de mettre en œuvre des programmes et des services et de formuler des recommandations sur cette substance en raison du manque de données scientifiques solides.

Joss Reimer, Santé Manitoba

La Dre Reimer a fait remarquer que les modèles de vente au détail du cannabis sont extrapolés de ceux qui existent pour l’alcool et qu’il faut disposer de données canadiennes afin de contribuer à l’élaboration de ces structures dans le contexte d’ici.

En outre, on a besoin de données sur la consommation de cannabis à domicile pour éclairer les interventions et les initiatives de sensibilisation. Le travail de couplage des données au Manitoba est particulièrement utile pour ces politiques à plus petite échelle, notamment parce qu’il fournit des preuves du lien entre la consommation de cannabis à domicile et les résultats possibles pour les enfants, y compris au chapitre de l’éducation, de la santé et des risques associés à leur présence dans des véhicules.

Nawaf Madi, Institut canadien d’information sur la santé

Le Dr Madi a parlé de l’importance d’établir une base de référence sur le comportement normatif afin de mesurer l’évolution des attitudes. Se servant du tabac comme exemple, il a mis en évidence le changement des perceptions relatives aux fumeurs au fil du temps. Il a aussi souligné qu’au cours de la décennie précédant la légalisation, il y a eu une hausse du taux d’hospitalisation pour usage de cannabis. Il ne s’agit cependant que d’un élément du casse-tête. Les données continuant à arriver, il sera important de poursuivre les recherches et l’échange de connaissances pour mieux comprendre les effets indésirables possibles de la légalisation du cannabis, en particulier chez les jeunes.

Tara Marie Watson, Centre de toxicomanie et de santé mentale (CAMH)

Faisant état des discussions avec d’autres membres de l’équipe et l’utilisateur des connaissances du projet, la Dre Watson a parlé de l’importance de collaborer avec les communautés et de s’engager auprès d’elles dans le respect de leur culture lorsqu’on réalise des recherches. Par exemple, s’ils proposent de mener une recherche avec des communautés autochtones, les chercheurs doivent se renseigner sur les principes de l’éthique de la recherche communautaire et les respecter, et dialoguer avec les communautés afin de comprendre leurs priorités et leurs intérêts. Dans les récentes expériences de recherche qu’elle a soulevées, elle a fait ressortir l’importance de saisir les enjeux liés à la souveraineté autochtone et aux nouvelles lois adoptées par suite de la légalisation du cannabis. Elle a également abordé les principaux principes que les chercheurs doivent mettre en pratique relativement à la propriété et à la protection des données des communautés autochtones et à l’accès à ces renseignements, y compris le recours à des ententes de partage de la recherche collaborative.

La Dre Watson a indiqué que la recherche collaborative responsable implique une indemnisation équitable et une reconnaissance appropriée des contributions ainsi qu’une participation significative des communautés dès que possible, comme lors de la formulation des questions de recherche. Ce type d’engagement et d’établissement de relations prend du temps et peut ne pas être faisable dans le cadre d’un projet d’un an.

Dans le cas du projet Réactions des provinces et des principales communautés à la légalisation fédérale du cannabis : étude portant sur plusieurs autorités, des discussions préliminaires avec les communautés autochtones et l’inclusion de membres des communautés racisées ont entraîné le recadrage de la proposition et des questions par l’abandon d’une approche axée sur les risques et les déficits et l’adoption de démarches plus orientées vers l’action et la résilience. En outre, on souhaite vivement communiquer aux communautés les constatations des recherches. Les participants veulent souvent s’investir dans les activités de diffusion, y compris l’élaboration d’outils d’éducation et de sensibilisation, en particulier pour l’éducation des jeunes, et la réalisation d’initiatives visant à réduire les inégalités sanitaires et sociales de longue date.

Chelsey Hartwig, Université de la Colombie-Britannique

Mme Hartwig, spécialiste de la santé de son université, a traité des problèmes que le cannabis consommé à des fins non médicales est susceptible de causer dans les campus. Par exemple, comme l’usage est permis à l’université, l’éducation sur l’utilisation sans danger, la sécurité routière et l’exposition à la fumée secondaire du tabac dans les endroits où l’on consomme du cannabis constitue une priorité pour les étudiants. Elle a aussi fait ressortir l’absence d’harmonisation à travers le pays de la règlementation de l’usage du cannabis sur les campus postsecondaires, ce qui renforce la nécessité d’une sensibilisation continue.

Période de questions (tous les participants)

Après les présentations des utilisateurs des connaissances, les participants ont été invités à leur poser des questions. Voici un résumé de la discussion.

Il est nécessaire d’améliorer la collecte de données sur les rapports entre l’origine ethnique et la consommation de cannabis. Bien qu’on puisse se servir de certaines données sur l’immigration comme substituts pour l’origine ethnique et que des renseignements existent dans des rapports de police, la collecte de ces données constitue un processus lourd. Actuellement, les enquêtes de Statistique Canada sur le cannabis ne recueillent pas de données sur l’origine ethnique.

Des communautés contestent, exigeant des preuves que la fumée du cannabis est aussi malsaine que celle du tabac, malgré le fait que les constituants sont semblables. Comme les perceptions et la tolérance des communautés donneront souvent une impulsion à la mise en œuvre de règlements par les divers ordres de gouvernement, la réaction négative contre les lois restrictives sur le cannabis engendre le souhait de disposer de données propres au cannabis pour soutenir des politiques fondées sur des données probantes.

Séance 2 : Populations prioritaires

Lors de cette séance, il y a eu cinq présentations de recherches ainsi qu’un panel de discussion sur les populations prioritaires.

Prévention ciblée du cannabis pour les jeunes à risque élevé de psychose

Présentatrices : Patricia Conrod et Josiane Bourque, Université de Montréal

La Dre Conrod et Mme Bourque ont présenté ensemble leur projet axé sur la consommation de cannabis par les jeunes à risque élevé de psychose et les stratégies de prévention des drogues ciblant ceux-ci.

Les troubles psychotiques ne sont pas très prévalents, mais on a constaté qu’ils étaient plus étroitement associés à la consommation de cannabis que d’autres maladies mentales, y compris la dépression. Les jeunes qui commencent à consommer du cannabis tôt, ceux qui en prennent beaucoup et ceux qui présentent des symptômes subcliniques de psychose courent un risque élevé d’être atteints de ce dernier trouble.

Dans la population générale des jeunes du secondaire, l’usage du cannabis était prédictif de symptômes psychotiques sur une période de 12 mois. Cette relation était présente chaque année au cours de l’adolescence.

Lors de l’examen des données longitudinales, les chercheurs ont noté que les jeunes qui prenaient du cannabis et de l’alcool dans le but précis de faire face à la dépression étaient exposés à un plus grand risque de psychose. En outre, on a observé que ces jeunes encouraient le risque de symptômes psychologiques plus généraux un an plus tard et tout au long des études secondaires. Cette relation s’explique peut-être par le fait que la dépression constitue un facteur médiateur entre le cannabis et la psychose. Par exemple, l’intériorisation des symptômes est susceptible de mener à de mauvaises stratégies d’adaptation (y compris la consommation de cannabis et d’autres substances). Jumelées avec l’hostilité, ces stratégies étaient prédictives de symptômes psychotiques.

Comprenant mieux la coévolution des facteurs de risque cognitifs et comportementaux chez les jeunes à risque, les chercheurs ont pu adapter des interventions psychologiques en milieu scolaire pour cibler plus précisément ceux qui présentaient des risques de psychose. La Dre Conrod et son équipe organisent des groupes de discussion avec des jeunes à risque élevé afin de mieux saisir les éléments déclencheurs et les processus cognitifs liés aux motifs de la consommation de cannabis et les pensées apparentées à la psychose. Les témoignages issus de ces entrevues sont en train d’être incorporés dans des manuels d’intervention cognitivo comportementale afin d’élargir un programme de prévention de la toxicomanie (Preventure), qui a fait preuve d’efficacité dans la réduction de la consommation d’alcool et de cannabis, de manière à ce qu’il cible plus précisément les jeunes à risque de psychose. Cette subvention Catalyseur a soutenu une étude pilote sur l’acceptabilité et la faisabilité du ciblage du cannabis et du risque de psychose dans de brèves interventions cognitivo comportementales auprès des jeunes à risque.

Création d’un sondage sur la consommation de cannabis par les jeunes : comprendre l’évolution de la consommation chez les jeunes Canadiens

Présentateur : Martin Cooke, Université de Waterloo

Le Dr Cooke a mis en évidence le besoin de meilleures données de surveillance sur la consommation de cannabis par les jeunes. Les données actuelles se concentrent sur la prévalence, mais n’examinent pas d’autres facteurs, comme l’exposition à domicile, le moment de l’utilisation, les habitudes de consommation et la susceptibilité à celle-ci, entre autres. Cette étude visait à combler deux lacunes : l’utilisation de sources de données existantes pour établir des tendances de base globales et la mise au point d’un nouveau sondage dans le but d’accroître les collectes de données et de mesurer d’autres aspects de la consommation de cannabis par les jeunes.

Des rapports sur les données de base ont été créés à partir de tendances et de sondages de surveillance nationaux. L’équipe de recherche collabore avec le CCDUS pour l’élaboration de fiches de renseignements sur les meilleures données disponibles. Elles seront publiées bientôt.

Les chercheurs ont formulé les recommandations suivantes sur le sondage : utiliser un sondage papier en classe destiné aux élèves de la 7e à la 12e année (les méthodes en ligne sont difficiles à exécuter en classe), voir à ce que le sondage puisse être une enquête autonome ou un module intégré à d’autres initiatives de collecte de données, et employer des questions qui ont déjà été validées par d’autres sources de sondage. Parmi les données précises dont il faut tenir compte, on trouve les renseignements démographiques, la prévalence, la fréquence, le type et la quantité de cannabis consommé, l’usage avec d’autres substances, les sources et le coût, les raisons qui sous-tendent la consommation ou la non consommation, l’incidence perçue de la consommation, les perceptions à l’égard de celle-ci, l’exposition sociale au cannabis et l’exposition à des messages, comme ceux des campagnes d’éducation en matière de santé publique ou des publicités.

Les chercheurs collaborent avec des groupes de discussion composés d’étudiants pour obtenir leurs commentaires sur la conception du sondage, définir le langage et choisir les images qui ont le plus d’impact.

Influence de l’exposition au cannabis durant la grossesse sur la santé périnatale et infantile : cohorte de naissances populationnelle

Présentateur : Daniel Corsi, Institut de recherche de l’Hôpital d’Ottawa

Le Dr Corsi a analysé les données périnatales recueillies en Ontario entre 2007 et 2017 (avant la légalisation) pour dégager les tendances de la consommation de cannabis durant la grossesse et les associations avec les issues maternelles et périnatales indésirables et les résultats défavorables pour le développement neurologique de l’enfant.

Selon les résultats, entre 2012 et 2017, 1,4 % des femmes ont déclaré avoir pris du cannabis à un moment donné au cours de leur grossesse, tandis que cette proportion était de 0,6 % entre 2007 et 2012. L’usage de plusieurs substances était courant, y compris celui du tabac (78 %), de l’alcool (4 %) et d’autres drogues (39 %). La consommation de cannabis a été associée à la naissance prématurée, à la petite taille pour l’âge gestationnel, au décollement placentaire, au transfert aux soins intensifs de néonatologie et à un indice d’APGAR inférieur à 4 à 5 minutes. Quand on se penche sur les résultats pour le développement neurologique de l’enfant, l’exposition prénatale au cannabis a été associée au trouble du spectre de l’autisme, aux difficultés d’apprentissage et aux troubles déficitaires de l’attention.

Les chercheurs ont constaté que l’usage de cannabis durant la grossesse a augmenté au fil du temps et qu’il est le plus élevé chez les jeunes mères (de 15 à 24 ans; prévalence de 5 à 6 %) et les mères à faible revenu (prévalence de 2 à 3 %).

Ces résultats laissent entendre que la grossesse constitue une occasion de recourir à des ressources ciblées, y compris la sensibilisation. Ces constatations peuvent être particulièrement importantes pour les groupes à risque élevé, comme les jeunes mères et les mères à faible revenu. D’autres études sont nécessaires sur la quantité de cannabis consommée et le moment de son usage durant la grossesse, en particulier après la légalisation, où la consommation est susceptible d’augmenter (p. ex. en raison de l’automédication pour la nausée).

Trajectoires de consommation de marijuana sur une décennie : prédicteurs au cours de l’adolescence et impact sur la santé, le rendement scolaire, et les résultats sociaux et économiques chez les jeunes adultes

Présentateur : Bonnie Leadbeater, Université de Victoria

La Dre Leadbeater a traité des habitudes de consommation du cannabis chez les adolescents canadiens entre 2003 et 2013. Ils comptent parmi les utilisateurs les plus jeunes et les plus fréquents de cette substance dans le monde développé. Son étude a constaté que 28 % des jeunes âgés de 11 à 15 ans avaient consommé du cannabis au cours de la dernière année. Il y a une association étroite entre le début de l’usage de cette substance à 13 ans et des problèmes plus tard dans la vie.

La Dre Leadbeater a repéré cinq différents types de consommateurs, de l’adolescence au début de l’âge adulte, selon leurs habitudes : ceux dont la consommation avait augmenté (lent commencement et augmentation rapide de l’usage à plus d’une fois par semaine, puis diminution lente de celui-ci), ceux dont la consommation avait diminué (forte utilisation durant l’adolescence, puis diminution constante au fil du temps), les consommateurs occasionnels (de quelques fois par année à quelques fois par mois), les consommateurs chroniques (commencement précoce et usage fréquent; plus d’une fois par semaine à tout âge), et les abstinents. Les jeunes qui consommaient de plus en plus ou dont la consommation était chronique étaient plus susceptibles d’être de sexe masculin; avaient commencé à prendre du cannabis à 13 ans en moyenne; présentaient des symptômes de toxicomanie et des problèmes de santé physique, d’extériorisation et de sommeil; connaissaient moins de succès sur le plan des études, du travail et des relations; mangeaient mal.

La Dre Leadbeater s’est également intéressée aux habitudes de consommation concomitante de cannabis et d’alcool. La plupart des consommateurs de cannabis ont commencé avant d’avoir 18 ans. Quatre-vingt-dix-neuf pour cent d’entre eux prenaient aussi de l’alcool, tandis que 41 % de ceux qui utilisaient à la fois du cannabis et de l’alcool les consommaient à moins d’une heure d’intervalle (usage concomitant). La consommation simultanée a été associée à des risques plus élevés que celle d’une seule substance isolément.

Enfin, la Dre Leadbeater a souligné que le travail dans des professions à prédominance masculine constituait un prédicteur de la consommation de substances.

Impact de la légalisation du cannabis sur sa consommation et résultats chez les personnes présentant un trouble lié à la consommation d’opioïdes : étude de cohorte prospective canadienne

Présentateur : Lehana Thabane, Université McMaster

Au nom de son équipe (Zainab Samaan, Tea Rosic, Nitika Sanger, David Marsh, James MacKillop, Lehana Thabane, Alannah Hillmer, Jackie Hudson), le Dr Thabane a présenté son étude, qui consistait à examiner le lien entre l’usage de cannabis et la consommation d’opioïdes illicites chez des patients présentant un trouble lié à la consommation d’opioïdes durant un traitement assisté par des médicaments avant et après la légalisation du cannabis.

Les personnes souffrant de troubles psychiatriques, y compris celui lié à l’usage d’une substance, prennent du cannabis plus souvent que la population générale. En outre, elles présentent une prévalence plus élevée de trouble de l’usage du cannabis, ce qui a une incidence sur leur pronostic et les résultats de leur traitement. La consommation quotidienne de cannabis semble avoir augmenté après la légalisation, mais de peu seulement, tandis que beaucoup de gens achètent encore leur produit dans la rue plutôt que chez un détaillant légal. Environ la moitié des usagers de la substance n’étaient pas au courant de la marque ou de la souche qu’ils prenaient.

Chez les patients aux prises avec un trouble de consommation d’opioïdes, l’usage de ces substances avant et après la légalisation du cannabis était comparable, mais il y a beaucoup d’aspects à approfondir. On a constaté des différences relativement à la fréquence et à la méthode de consommation ainsi qu’en ce qui concerne la source.

De futures analyses se pencheront sur les effets liés au sexe et au genre avant et après la légalisation ainsi que sur les associations avec la consommation d’autres substances ou drogues illégales et les tendances du dépistage de drogues dans l’urine. Les chercheurs ont fait remarquer qu’il est nécessaire de surveiller les personnes aux prises avec un trouble de consommation d’opioïdes dans le contexte de la légalisation du cannabis (préjudices et bienfaits).

Perspective des utilisateurs des connaissances et panel de discussion

Dans cette portion de l’atelier, les utilisateurs des connaissances ont présenté leurs perspectives sur les cinq projets de recherche abordés lors de la séance 2. Les participants ont ensuite été invités à poser des questions, puis une discussion de groupe a eu lieu.

La modératrice du panel était Kira London-Nadeau, de la Canadian Students for Sensible Drug Policy. Elle a amorcé la discussion en insistant sur l’importance de la participation des jeunes à la recherche sur le cannabis ainsi qu’au transfert et à la dissémination des connaissances sur cette drogue.

Helen Hsu, Hôpital général de Brockville

La Dre Hsu a souligné l’utilité des perspectives cliniques pour repérer les lacunes dans les connaissances. Par exemple, dans sa pratique, elle a constaté que des femmes consultent Internet pour obtenir des conseils sur la façon dont le cannabis peut atténuer les nausées liées à la grossesse. Il s’agit là d’une lacune évidente où des messages fondés sur des données probantes sont nécessaires pour informer les femmes des risques de l’usage du cannabis lorsqu’elles sont enceintes. Il faut disposer de données sur les résultats de la consommation prénatale de cannabis pour éduquer à la fois les patients et les cliniciens et pour contrer les messages trompeurs qui ne sont pas étayés par la recherche.

Richard Stanwick, Autorité de la santé de l’île de Vancouver

Le Dr Stanwick a parlé de l’accessibilité du cannabis et de la prévalence de son usage chez les jeunes Britanno-Colombiens, indiquant qu’un plus grand nombre d’entre eux ont fait l’expérience du cannabis que du tabac. Des progrès ont été accomplis au chapitre de la collecte et de la diffusion de données sur la consommation de drogues par les jeunes, mais ces renseignements doivent être disponibles plus rapidement. Il faut travailler en amont pour repérer les jeunes à risque avant qu’ils deviennent dépendants, en particulier en réalisant des interventions dans les écoles avant que les élèves obtiennent leur diplôme et deviennent moins accessibles.

Le Dr Stanwick a mis en garde contre la sous-estimation possible, par les décideurs et les chercheurs, de l’incidence du cannabis comestible si l’on permet à l’industrie d’introduire une variété de produits sans surveillance suffisante.

Jasmine Fournier, Thunderbird Partnership Foundation

Mme Fournier a apporté une perspective autochtone à la discussion et incité les participants à penser à la manière dont ils peuvent améliorer les relations avec les groupes autochtones. Il y a 133 Premières Nations seulement en Ontario. Les activités d’engagement doivent être propres à la communauté au lieu d’être uniformisées. En outre, plus de travail doit être accompli pour cerner les besoins des communautés et donner à celles-ci les moyens d’agir. L’accent doit être mis sur le bien-être mental (les forces plutôt que les manques), surtout chez les jeunes.

Frank Crichlow, Association canadienne des personnes qui utilisent des drogues

M. Crichlow a parlé au nom des personnes ayant vécu une expérience concrète liée à la drogue. Il a rappelé aux participants que les conséquences de la criminalisation affectent de manière disproportionnée les groupes marginalisés, en particulier les Noirs, les Autochtones et d’autres groupes racisés. Bien que le cannabis soit maintenant légal, de nombreuses personnes demeurent incarcérées pour des infractions liées au cannabis. Des pardons sont nécessaires et se font attendre pour ces gens.

Période de questions (tous les participants)

Après les présentations des utilisateurs des connaissances, les participants ont été invités à leur poser des questions. Voici un résumé de la discussion.

La collaboration avec les communautés et les jeunes autochtones doit être perçue plus largement et non seulement en termes de marginalisation. Le travail avec ces communautés est un processus bidirectionnel (l’ouvrage publié par Christopher Mushquash de l’Université Lakehead constitue une référence à cet égard). Il est important que les mesures de données fonctionnent pour la communauté, que le contexte soit convenablement décrit, qu’on adopte une démarche englobant toute la communauté et que le matériel d’intervention soit adapté au besoin. Ce processus demande du temps et de l’attention afin d’obtenir des produits et des résultats mieux étayés.

Il est actuellement difficile de trouver des renseignements de qualité fondés sur des données probantes, alors que les fausses informations sont facilement disponibles. Les Canadiens veulent des renseignements documentés sur le cannabis. Si les fournisseurs de soins ne parlent pas de cette drogue à leurs patients, ceux-ci chercheront probablement des conseils ailleurs. Il est crucial et urgent de formuler de nouveaux messages factuels. Il faut s’efforcer d’éviter la stigmatisation, surtout celle des populations vulnérables. Par exemple, les femmes enceintes sont très stigmatisées et la publicité relative à la santé publique concernant la consommation de cannabis durant la grossesse risque d’aggraver cette stigmatisation.

Séance 3 : Facultés affaiblies

Lors de cette séance, trois recherches ont été présentées puis un panel de discussion sur les facultés affaiblies par le cannabis a eu lieu.

Perceptions et caractéristiques des personnes qui prennent le volant sous l’influence du cannabis

Présentateur : Jorge Flores Aranda, Université de Sherbrooke

Au nom du chercheur principal, Dr Christophe Huynh, le Dr Flores Aranda a présenté cette étude mettant en évidence les préoccupations à l’égard de la hausse des taux de conduite sous l’influence du cannabis après la légalisation. On sait que cette drogue diminue les facultés cognitives et psychomotrices. La présence de THC est associée à un risque plus élevé d’accident de la route. Cette étude a sondé des Canadiens âgés de 17 à 35 ans qui possèdent un permis de conduire et qui avaient consommé du cannabis au cours des 12 mois précédents afin de déterminer les facteurs qui influencent les jeunes Canadiens à conduire avec les facultés affaiblies.

Selon les analyses préliminaires, 54 % des participants avaient conduit sous l’influence du cannabis, 9 % sous celle du cannabis et de l’alcool et 3 % sous celle de l’alcool seulement. Parmi ceux qui avaient conduit avec les facultés affaiblies, on trouve 66 % d’hommes, 90 % de personnes qui prenaient du cannabis au moins une fois par semaine, tandis que plus de la moitié répondaient aux critères du trouble de l’usage du cannabis.

Cette sous-population présentait d’autres caractéristiques, dont celles-ci : ces gens étaient des conducteurs réguliers; ils étaient plus susceptibles d’être impulsifs ou d’avoir un comportement de conducteur dangereux, comme la vitesse; ils avaient des perceptions négatives à l’égard des transports publics; ils étaient moins au courant des répercussions légales de la conduite avec facultés affaiblies; ils étaient moins portés à croire que l’affaiblissement des facultés par cette drogue était détectable; ils étaient d’avis que la conduite sous l’influence du cannabis était une activité à faible risque.

Des messages de prévention sont nécessaires pour réduire les risques associés à ce type de conduite. Ces messages doivent porter sur les répercussions légales, les risques pour la sécurité, la promotion d’options de transport de rechange et la mise en doute de la perception subjective de l’intoxication.

Vers la surveillance de la conduite avec les facultés affaiblies par le cannabis ou d’autres drogues

Présentatrice : Marie Claude Ouimet, Université de Sherbrooke

La Dre Ouimet a traité de la conduite avec les facultés affaiblies par le cannabis. Pour bien comprendre la situation, il faut surveiller les conséquences négatives de ce type de conduite, comme les collisions, les arrêts et les condamnations, ainsi que d’autres variables susceptibles d’aider à expliquer les changements de ces conséquences (p. ex. les poursuites fructueuses). Bien que certains de ces renseignements soient déjà contenus dans des plateformes de données établies, des variables supplémentaires ne sont probablement pas recueillies.

Ayant déjà recruté 23 organismes, cette étude relèvera les indicateurs de données nécessaires et les processus par lesquels ils peuvent être recueillis pour éclairer l’élaboration d’une stratégie de surveillance de la conduite avec les facultés affaiblies par le cannabis.

Cannabis de 5 à 7? Éclairer la brume sur la consommation du cannabis dans le lieu de travail canadien

Présentatrice : Nancy Carnide, Institut de recherche sur le travail et la santé

La Dre Carnide a décrit les constatations d’une enquête réalisée avant la légalisation auprès de travailleurs canadiens afin de comprendre les habitudes de consommation de cannabis ainsi que les perceptions et les manques de connaissances relativement à l’usage de cette substance dans le lieu de travail. Elle a fait remarquer que les travailleurs constituent un sous groupe de population à examiner pour saisir l’incidence potentielle de la légalisation du cannabis sur les milieux de travail et la nécessité de programmes éducatifs destinés à atténuer le risque professionnel.

Selon cette étude, 30 % des travailleurs interrogés avaient consommé du cannabis l’année précédente pour une variété de raisons non médicales (pour la relaxation, se sentir bien, une occasion spéciale) et médicales (pour le sommeil, la douleur, le stress, l’anxiété). Certains ont indiqué que leur usage de la drogue était directement lié à leur travail (p. ex. pour la gestion du stress, le soulagement de la douleur). Parmi les travailleurs ayant déclaré avoir pris du cannabis l’année précédente, environ un quart ont dit qu’ils en avaient consommé avant ou durant le travail. La plupart des travailleurs étaient d’avis que l’usage du cannabis au travail était risqué, mais ils estimaient qu’il l’était moins s’il avait lieu deux heures avant de travailler. Certains ont exprimé l’avis que le cannabis les aidait au travail.

La Dre Carnide a souligné le manque de connaissances sur les politiques concernant l’usage de substances dans les milieux de travail, le moment où les effets de la consommation de cannabis se font sentir (en particulier celle du cannabis comestible) et la teneur en THC du cannabis consommé. Il est nécessaire de fournir des conseils à la fois aux employeurs et aux employés sur l’usage de cette drogue dans le lieu de travail.

Perspective des utilisateurs des connaissances et panel de discussion

Dans cette portion de l’atelier, les utilisateurs des connaissances ont présenté leurs perspectives sur les trois projets de recherche abordés lors de la séance 3. Les participants ont ensuite été invités à poser des questions, puis une discussion de groupe a eu lieu.

La modératrice du panel, Dre Karen Koundakjian de Sécurité publique Canada, a amorcé la discussion en soulignant l’importance de disposer de données de base pour mesurer l’incidence des politiques et des programmes. Elle a ajouté que l’observation de la situation aux États-Unis pourrait être utile pour l’obtention de données et de résultats fiables.

Alain Jacques, CIUSSS du Centre-Sud-de-l’Île-de-Montréal

M. Jacques a parlé de l’incidence possible de la légalisation du cannabis sur la conduite avec facultés affaiblies et de l’importance d’utiliser des critères fondés sur des données probantes pour mesurer le degré d’amoindrissement des capacités. En outre, des données sont nécessaires afin de soutenir les condamnations pour conduite avec facultés affaiblies et d’éclairer l’élaboration des critères que les conducteurs devraient remplir pour récupérer leur permis.

Par ailleurs, des outils de sensibilisation adéquats sont nécessaires pour les fournisseurs de services et les conducteurs, qui doivent comprendre les effets du cannabis (y compris du cannabidiol) sur le fonctionnement cognitif (y compris les expériences subjectives de conduite par rapport aux expériences objectives), sa détection (p. ex. l’analyse de salive et les conséquences d’ordre criminel) et la manière dont l’affaiblissement des capacités peut changer lorsque le cannabis est consommé avec de l’alcool ou d’autres substances.

Daniel Sansfaçon, Sécurité publique Canada

Le Dr Sansfaçon a mis en évidence les inquiétudes à l’égard des données sur la conduite avec les facultés affaiblies par la drogue. Le projet de loi C-46 a réformé la conduite avec les facultés affaiblies par l’alcool et la drogue en donnant aux services de police de nouveaux outils pour détecter et inculper les conducteurs et en octroyant des fonds pour soutenir des activités comme l’amélioration de la formation en matière d’application de la loi et de la collecte de données, dans l’attente que celles-ci soient réunies et utilisées pour présenter des rapports sur des indicateurs nationaux normalisés relativement à ce type de conduite. Malheureusement, il y a un décalage entre les nouvelles exigences en matière de rapports et les données actuellement disponibles. Il y a d’importantes lacunes au chapitre de la couverture, de l’exhaustivité et de la fiabilité des données sur la conduite avec les facultés affaiblies par la drogue à l’échelle du pays et à celle des autorités compétentes. Il s’agit là d’un problème multiforme à l’égard duquel des changements sont nécessaires à de nombreux niveaux. Il faut que toutes les autorités compétentes, y compris Statistique Canada et les consortiums de recherche, collaborent pour élargir l’ensemble de données disponibles en améliorant la collecte de données sur l’application de la loi et en employant de nouveaux outils pour recueillir cette information.

Kim Slade, Association de santé et sécurité des services publics

Mme Slade a parlé des facultés affaiblies au travail et des préoccupations associées à la consommation de cannabis dans des postes de nature critique pour la sécurité. Les employeurs n’étaient pas préparés pour la légalisation. Ils ne sont pas certains de leurs responsabilités relativement à l’usage de cannabis au travail (y compris le cannabis comestible et l’affaiblissement retardé) et manquent d’outils et de renseignements pour éduquer leurs employés. Ils ont besoin d’aide pour l’élaboration de politiques et de procédures concernant le cannabis au travail.

Période de questions (tous les participants)

Après les présentations des utilisateurs des connaissances, les participants ont été invités à leur poser des questions. Voici un résumé de la discussion.

Il faut mettre au point une base de données probantes et élaborer des normes nationales en matière de conduite avec les facultés affaiblies par le cannabis, ainsi qu’orienter les processus par lesquels les personnes récupéreraient leur permis (p. ex. en effectuant un suivi auprès des personnes dans cette situation). Des mesures semblables ont été prises relativement aux permis professionnels, par exemple pour les médecins qui ont perdu le leur à cause de leur consommation de drogue.

Les jeunes sont exposés à l’alcool et au cannabis comme passagers de véhicules. Les personnes qui prennent du cannabis fréquemment ou en grande quantité croient souvent qu’elles ont acquis une tolérance et que leurs facultés ne sont pas affaiblies, mais la corrélation entre l’affaiblissement qu’elles perçoivent et la teneur de cannabis dans le sang n’est pas claire. On a besoin de plus de données probantes sur les perceptions de l’affaiblissement des capacités. Il faut aussi traiter des perceptions du risque entourant la consommation de cannabis et la conduite automobile.

À la lumière des données probantes sur la consommation de cannabis au travail, il est évident que des interventions s’imposent pour réagir aux perceptions des consommateurs de cette substance relativement à la sécurité professionnelle.

Séance 4 : Besoins des chercheurs et des intervenants

Lors de cette séance, deux présentations ont offert les perspectives uniques de parties prenantes : la consommation de cannabis du point de vue de ses usagers et les stratégies de participation des jeunes à la recherche sur cette substance.

Lors de la plénière qui a suivi, les experts présents ont formulé des conseils et proposé des stratégies pour mettre en évidence les priorités, les lacunes en matière de connaissances et les pratiques exemplaires actuelles.

Trouble de consommation de cannabis et rétablissement : perspective interne

Présentateur : Rand Teed, Drug Class Program

M. Teed a parlé du trouble de consommation de cannabis et du rétablissement. Il est difficile de s’attaquer à la stigmatisation, tant du point de vue du clinicien que de celui du patient. Les cliniciens éprouvent peut-être une déconsidération généralisée envers la consommation de toutes les substances et nient les besoins des patients, tandis que les consommateurs de cannabis sont susceptibles de ressentir de la honte ou de l’embarras ou de penser que l’usage de cette drogue ne constitue pas un problème grave. La réduction de la stigmatisation dans les deux sens pourrait inciter les consommateurs de cannabis à demander de l’aide.

L’intervention précoce est essentielle en présence du trouble de consommation de cannabis; trop souvent, on ne s’attaque pas à l’usage avant que les patients aient touché le fond du baril. Il importe de percevoir la consommation de substances comme un spectre et d’être à l’affût des signes et des symptômes précoces. Les personnes atteintes de troubles liés à l’usage d’une substance doivent savoir que l’on soutient et que l’on souhaite leur rétablissement. En outre, le traitement de ces troubles devrait être considéré comme absolument essentiel pour la santé de la personne, à l’instar de celui de n’importe quelle autre maladie. M. Teed a fait remarquer que, dans de nombreux cas, les gens prennent une substance pour compenser un besoin fondamental qui n’est pas satisfait ailleurs. Il suggère de ne pas nécessairement regarder la consommation de substances comme un problème, mais plutôt comme un symptôme, en ce sens que les patients emploient peut-être le cannabis parce qu’il soulage une douleur ou une inquiétude.

Les cliniciens ont besoin de plus de formation et d’outils pour soutenir les personnes atteintes de troubles liés à l’usage d’une substance. M. Teed a souligné certains éléments importants du rétablissement : celui des liens sociaux, le règlement des problèmes sous-jacents susceptibles d’avoir mené à la consommation, la préparation des patients aux symptômes de sevrage (y compris les réactions émotionnelles, comme les sentiments de vulnérabilité), la méditation, la nutrition, l’exercice physique, la thérapie et la reprise des activités que les patients ont déjà aimé faire.

Participation des jeunes à la planification, à la conception et à la réalisation de la recherche

Présentatrices : Lisa D. Hawke et Jacqueline Relihan, Centre de toxicomanie et de santé mentale

La Dre Hawke et Mme Relihan ont traité des avantages de la participation des jeunes à la planification, à la conception et à la réalisation de la recherche ainsi que des stratégies pour leur mobilisation de façon significative. Souvent ignorés, les jeunes peuvent contribuer à la formulation des questions de recherche, inciter d’autres jeunes à participer aux travaux, aider à l’élaboration de stratégies de recrutement, soutenir la collecte et l’interprétation des données et faciliter le transfert des connaissances vers d’autres jeunes en rendant les messages plus adaptés à ceux-ci. En retour, ils tirent profit de cette implication et signalent que leur participation à la recherche est valorisante, qu’elle les aide à acquérir une variété de compétences et leur fournit des possibilités de mentorat, une rémunération et une occasion d’intervenir de façon citoyenne pendant longtemps et de s’investir socialement.

Les présentatrices ont incité les participants à l’atelier à penser aux moyens par lesquels ils pourraient mobiliser les jeunes par divers types de participation. Elles ont donné comme exemples les groupes de discussion, les sondages, les groupes consultatifs, les possibilités de formulation de commentaires ou la contribution à la prise de décisions et à l’élaboration des projets.

Comme avec n’importe quel groupe de parties prenantes, la mobilisation des jeunes prend du temps. Si elle est faite adéquatement, en incorporant les principes de la réciprocité et de la collaboration, la participation des jeunes à la recherche peut se révéler une contribution importante à l’amélioration du processus et du produit final. Les présentatrices ont donné quelques conseils pour l’implication des jeunes : fournir une rémunération, expliquer les avantages de leur participation, donner des séances d’information avant et après les réunions, employer un langage adapté aux jeunes (en évitant le jargon et les sigles qu’ils ne comprennent peut-être pas) et demeurer souple et ouvert d’esprit.

Elles ont aussi incité les participants à réfléchir à l’ensemble de données probantes actuel et à la façon dont il peut être adapté à divers publics et contextes par un engagement pertinent. Les Recommandations canadiennes pour l’usage du cannabis à moindre risque, outil d’intervention en matière de santé publique fondé sur des données probantes, ont été citées comme exemple de la manière dont la participation des jeunes a permis de convertir les données issues de la recherche en ressource adaptée à leur groupe d’âge. Elles ont fait l’objet d’une ressource haute en couleur en format de poche (« La vérité crue » [ PDF (1,25 Mo) - lien externe ]) qui utilise un langage adapté aux jeunes pour les renseigner et promouvoir la prise de décisions éclairées à propos de la consommation de cannabis. Cette ressource a établi le record de téléchargements du site Web du CAMH.

« Youth Engagement Guidebook for Researchers » (en anglais seulement)

Discussion plénière

Le Dr Samuel Weiss a animé une discussion plénière finale. Il a résumé les principales constatations et les lacunes en matière de connaissances dont il a été question tout au cours de la journée. Il a invité les participants à faire part de leurs réflexions. Voici un résumé de la discussion, organisé selon les thèmes abordés.

Le cannabis et les jeunes

Non seulement est-il très utile de faire participer les jeunes aux recherches, mais les chercheurs, les gouvernements et les autres parties prenantes ont aussi l’obligation de voir à ce que les données scientifiques soient bien rendues accessibles aux populations de jeunes. L’implication de ceux-ci dans les projets de recherche peut se révéler plus difficile et prendre plus de temps, mais elle enrichit les travaux et améliore le transfert et la diffusion des connaissances.

Beaucoup de troubles psychiatriques trouvent leur origine dans l’adolescence. Les risques de la consommation de cannabis durant cette période de la vie doivent être communiqués adéquatement aux jeunes. Lorsqu’il s’agit de cette population vulnérable, la prévention est importante, mais les méthodes efficaces à cet égard sont mal comprises. Des travaux antérieurs portant sur l’alcool et le tabac montrent que les programmes scolaires de prévention sont inefficaces, ce qui fait ressortir la nécessité de nouvelles approches ciblées relativement à la consommation de cannabis.

Les comportements de consommation du cannabis

De nouvelles recherches sont nécessaires pour tenir compte de la manière dont la légalisation du cannabis a modifié les comportements de consommation au Canada. Le cannabis remplace d’autres substances (p. ex. l’alcool) et est pris avec elles. Cette situation va probablement prendre encore plus d’ampleur avec l’introduction du cannabis comestible dans le marché légal. Les messages de santé publique sont incroyablement importants pour l’information d’une population potentiellement naïve.

La consommation de cannabis durant la grossesse et l’allaitement comporte des risques, mais il manque de renseignements exacts et faisant autorité pour informer les femmes enceintes et allaitantes. L’information sanitaire fondée sur des données probantes doit être communiquée au public à partir de sources fiables et dignes de foi.

Le cannabis et les risques perçus

L’impact de la conduite avec les facultés affaiblies par le cannabis et de la consommation de celui-ci au travail est très important. Les recherches initiales montrent que certains consommateurs de cannabis ne croient pas que la conduite ou le travail sous son influence soit dangereux. Des données sont nécessaires au sujet des effets sensoriels de l’usage de cannabis ainsi que des messages adaptés afin de faire connaître adéquatement les risques aux consommateurs de la substance et aux employeurs.

Biais possible des données de base sur la consommation de cannabis

L’information de base sur la consommation de cannabis avant et après la légalisation comporte peut-être un biais inhérent. Les enquêtes par autodéclaration sous-représentent peut-être la situation de l’usage de cette drogue avant sa légalisation. Il est probable que les données recueillies lors d’enquêtes réalisées après la légalisation reflètent mieux la consommation réelle parce que les utilisateurs de cannabis sont plus susceptibles de répondre honnêtement aux sondages. Il est également possible que le nombre de personnes qui se présentent dans les centres antipoisons et consultent des fournisseurs de soins soit plus élevé depuis la légalisation. L’examen des changements survenus au chapitre de la consommation au cours des deux années suivant la légalisation par rapport à la situation au cours des quatre années précédant celle-ci constituerait peut-être une méthode plus efficace de collecte de données de base.

Conclusion

À la lumière des présentations sur les 14 projets financés par une subvention Catalyseur ainsi que des panels de discussion et des échanges en groupe subséquents, il semble impératif de mener plus de recherches pour permettre aux Canadiens de prendre des décisions éclairées sur le cannabis tout au long de leur vie. Il y a notamment un besoin urgent de données sur les risques de la conduite avec les facultés affaiblies par le cannabis, la consommation au travail de même que durant la grossesse et l’allaitement, et l’usage par les jeunes, surtout ceux qui sont vulnérables à la maladie mentale.

Il importe de tenir compte de la diversité du Canada et d’inclure dans les projets de recherche des utilisateurs des connaissances et des personnes ayant une expérience concrète de l’enjeu. Dans ce contexte, il faut notamment prendre adéquatement en considération la diversité culturelle et sociale ainsi que le sexe et le genre, et inclure les communautés autochtones et racisées dans les recherches sur le cannabis. Il faut résoudre des problèmes d’équité, étant donné que certains groupes sont susceptibles d’être touchés d’une manière disproportionnée par des aspects de la légalisation et de la règlementation.

Enfin, tous les Canadiens ont besoin de politiques fondées sur des données probantes ainsi que de messages fiables et dignes de foi sur la consommation de cannabis. Les stratégies de diffusion communautaires sont peut-être plus efficaces que les approches descendantes fédérales pour voir à ce que les connaissances atteignent les personnes qui en ont besoin.

Annexes

Veuillez communiquer avec le Centre de contact des IRSC pour consulter le livre complet des reunions de l'atelier.

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